Jeudi 8 juillet 2010, Benoît Poyet a soutenu sa thèse dont l’objectif était de mettre en pratique la définition du mètre à l’échelle de nanomètre en réalisant un Microscope à Force Atomique métrologique qui constituera la référence nationale française.
Exemple de réseau 2D utilisé
pour étalonner les AFM
(pas de 10 µm et hauteur de 180 nm)
Les microscopes en champ proche, et en particulier, le Microscope à Force Atomique (AFM), sont des outils parfaitement adapté à l’étude des propriétés physiques d’objets à l’échelle du nanomètre. C’est la raison pour laquelle il est très couramment utilisé dans le domaine des nanotechnologies et des nanosciences où les propriétés physiques des objets considérés sont fortement corrélés avec leurs dimensions. Typiquement, on réalise avec cet instrument des mesures dimensionnelles telles que : distance et pas de réseau, profondeur et hauteur de marche, caractérisation de forme, rugosité de surface, épaisseur de couche mince.
La justesse et les incertitudes des mesures sont garanties par l’étalonnage de ces microscopes en champs proche via des étalons de transfert assurant leur raccordement au mètre étalon. Jusqu’à ce jour, en France, la plupart des utilisateurs de ces instruments pour lesquels l’étalonnage est indispensable se tournent vers des méthodes de substitution (étalon de référence interne, étalonnage partiel) ou vers des laboratoires nationaux de métrologie étrangers.
Microscope à force atomique métrologique
développé au LNE
En France, le LNE est chargé de développer une expertise nationale dans le domaine de la nanométrologie dimensionnelle. Il a donc, dans le cadre d’une thèse dont l'objectif était de mettre en pratique la définition du mètre à l’échelle du nanomètre, réalisé un microscope à force atomique métrologique (mAFM), qui constituera la référence nationale française. Cet AFM, entièrement conçu au LNE, met en œuvre de nouvelles méthodes permettant de diminuer les niveaux d’incertitude existants. L’instrument permet des courses de déplacement de 60 µm suivant les directions horizontales et 15 µm dans la direction verticale. Les déplacements relatifs de la pointe par rapport à l’échantillon sont mesurés en utilisant des interféromètres différentiels étalonnés ; l’incertitude associée à cette mesure est de l’ordre du nanomètre pour la totalité de la gamme de déplacement : les incertitudes de mesure de la position de la pointe par rapport à l’échantillon sont de l’ordre du nanomètre.
Les travaux réalisés au cours de cette thèse ont été guidés par la préoccupation de réduire les facteurs prépondérants du bilan d’incertitudes de l’instrument, à savoir : l’erreur d’Abbe, la mesure interférométrique et les effets thermiques.
Sur le premier point, la conception d’une platine de guidage en translation à lames flexibles possédant trois degrés de liberté permet de minimiser l’erreur d’Abbe. Les rotations parasites mesurées sur les prototypes sont de l’ordre du microradian sur l’ensemble de la gamme de déplacement. Elles sont inférieures aux erreurs de guidages des platines de guidage disponibles dans le commerce.
Concernant le deuxième aspect, de gros efforts ont été fournis afin de mettre en place un environnement dans lequel les mesures interférométriques sont les plus stables et les plus exactes possibles. Par ailleurs, une démarche expérimentale a été adoptée pour tester, mesurer et simuler le processus de mesure des interféromètres différentiels utilisés. Les niveaux de dérive obtenus sont excellents pour un AFM métrologique qui fonctionne à l’air ambiant.
Enfin, la prise en compte des perturbations thermiques potentielles sur la mesure a été traitée lors de la conception du mAFM, minimisant ce point dans le bilan d’incertitude prévisionnel. La température est très homogène dans l’instrument et permet de favoriser un mode de dilatation qui ne perturbe pas trop le résultat de mesurage. Les stabilités en température mesurées sur l’AFM sont très bonnes et permettent de réduire l’amplitude des dilatations résiduelles et leur rang dans le bilan d’incertitude.
Les premières mesures réalisées sont présentées dans le manuscrit. Elles permettent de vérifier expérimentalement les hypothèses et les choix de conception. Ces résultats ont été ensuite utilisés afin de dresser un bilan d’incertitude prévisionnel qui regroupe les principales contributions perturbant le procédé de mesure.
Dans la mesure où l’instrument a été conçu avec une tête fixe, il est possible de la remplacer par n’importe quel autre type de capteur (SNOM, STM, microscope interférométrique…). Cet aspect ouvre des perspectives intéressantes, en rendant possible l’association aux mesures dimensionnelles traçables, de mesures d’une autre grandeur (électrique, mécanique, magnétique…). Le mAFM pourrait ainsi devenir un instrument métrologique multigrandeur à l’échelle nanométrique.